7 juin 2014, Mont-Valérien

Placée sous le haut patronage du Secrétaire d’Etat aux Anciens Combattants et à la Mémoire, la cérémonie annuelle organisée par l’Association pour le souvenir des Fusillés du Mont-Valérien et de l’Ile-de-France, s’est déroulée le 7 juin dernier devant un nombreux public. Annoncée sous le titre « S’unir pour vaincre le fascisme et pour reconstruire la France », elle était présentée dans des termes qui font écho à nos propres objectifs : poursuite du travail de mémoire – diffusion des valeurs de la Résistance – lutte pour la liberté, la démocratie et le progrès social, rejet de tous les racismes, de tous les négationnismes…

Dès 14h, le public a pris place à l’extérieur du Fort du Mont-Valérien, sur l’esplanade Franz-Stock, du nom de l’aumônier militaire allemand qui accompagna, dans le respect des convictions intimes de chacun, les otages et condamnés à mort passés par les armes dans la forteresse.
Le rassemblement populaire a débuté avec le spectacle préparé et interprété par Mesdames Sophie de La Rochefoucauld et Viviane Théophilidès.

L’évocation mise en scène abordait la libération du territoire et le retour à la République ; elle était construite à partir de textes en prose, de poèmes et de chants servis par les vibrantes prestations d’un groupe de jeunes comédiennes et comédiens du Lycée Jean Jaurès de Montreuil. Marie Ruggieri (chanteuse) et Christian Belhomme (pianiste) les accompagnaient et les complétaient avec talent.

À partir de 15h30, se déroulèrent les hommages publics. Tout d’abord, sur le parvis, face aux drapeaux disposés de part et d’autre de la monumentale croix de Lorraine du Mémorial de la France combattante, où cinquante-deux gerbes (un record !) ont entouré la vasque de bronze où brûle la Flamme de la Résistance ; puis, dans « La Clairière  » à l’intérieur du fort, sur les lieux mêmes des fusillades, pour la lecture de dernières lettres de fusillés. La chorale « Chantons Liberté » de Poitiers y interpréta Le Chant des Partisans  , La Complainte du Partisan et La Marseillaise. La prestation a été unanimement appréciée et a contribué à la réussite de cette cérémonie.
Des enfants ont souvent accompagné les élus lors des dépôts de gerbes.

Tout le monde put ensuite se rendre vers les espaces muséographiques de « la Chapelle  », de « l’Écurie » et du monument dédié aux Fusillés, haute « Cloche  » sans battant dont le manteau porte les noms des Fusillés identifiés jusqu’à ce jour.

À 18h, une forte délégation s’est rendue à l’Arc de Triomphe afin d’assister au ravivage de la Flamme du Soldat inconnu.

 


Mont-Valérien, 11 avril 2014

Le soleil est présent pour ce 70ème anniversaire des exécutions du 11 avril 1944. La cérémonie débute par trois allocutions : celle de Georges Duffau-Epstein, fils d’un des fusillés du 11 avril, suivie par le discours de Monsieur Fredj, directeur du Mémorial de la Shoah et la prise de parole de Madame Rose-Marie Antoine, directrice de l’ONAC, qui met l’accent sur la présence des enfants des établissements scolaires, porteurs de la mémoire dans l’avenir. Elle annonce, en outre, la reconduction de cette cérémonie dans les années futures. Les participants se rendent enfin devant la « Cloche » commémorative et découvrent l’exposition mise en place par le Mémorial de la Shoah.

Intervention de Georges Duffau-Epstein (extraits) :

« Ce n’est pas sans émotion que je m’adresse à vous dans cette clairière, sous ces grands arbres, témoins silencieux du courage des fusillés du 11 avril 1944. Parmi eux il y avait mon père, Joseph Epstein (colonel Gilles dans la Résistance). Il avait 33 ans. Je suis venu ici souvent étant enfant, avec ma mère, puis lors de nombreuses cérémonies. Enfin, j’accompagne sur ce lieu de nombreux groupes d’adultes ou d’écoliers, collégiens et lycéens afin de transmettre l’histoire de ces résistants et faire connaître les valeurs pour lesquelles ils se sont battus avec tant de courage. À chaque fois ma gorge se serre. Je ne peux oublier que mon père a vécu ici ses derniers instants.

11 AVRIL 1944, 22 PATRIOTES TOMBENT EN CE LIEU :
« Leurs noms figurent sur le monument du souvenir que l’on doit au talent de Pascal Convert. Erigée à l’initiative de Robert Badinter, La Cloche, comme tout le monde la nomme, a pour tout décor les identités des 1008 Résistants et Otages identifiés qui ont été exécutés par les nazis dans ce fort.
« Ils combattaient au sein de la Résistance. Ils avaient choisi la voie difficile du combat contre l’occupant et le gouvernement de Pétain.
« Ils défendaient des valeurs universelles : la liberté, le progrès social, la lutte contre tous les racismes (…). La démocratie était leur objectif. Ils étaient très nombreux à appartenir aux Francs-Tireurs et Partisans Français mais aussi à l’ensemble des autres mouvements de Résistance.
« Ils ont été fusillés ici et la mort n’a pas fait de différence entre eux. Quels que soient leurs origines sociales, leurs engagements politiques (communistes, socialistes, gaullistes, sans appartenance politique), leurs engagements syndicaux, leur religion quand ils en avaient une (catholiques, protestants, juifs, musulmans), l’amour de leur pays était le plus fort. Ce pays, la France, ils y étaient nés ou ils l’avaient choisi(e) comme terre d’accueil comme mon père, Polonais de naissance. Il est d’ailleurs difficile de citer tous les pays qui les ont vu naître tant ils sont nombreux. Pratiquement, tous les pays d’Europe sont représentés y compris l’Allemagne car des antifascistes d’origine allemande combattaient dans la Résistance. Souvenons-nous qu’un des plus jeunes, fusillé de cette clairière, se nommait Karl Shoenaar. Il avait 17ans et son père, communiste allemand, était mort en 1938 dans un camp de concentration nazi. Pour certains, le combat contre le nazisme avait débuté dans leur pays d’origine et s’était poursuivi dans les rangs des Brigades Internationales qui se battaient contre Franco au côté des Républicains espagnols.

11 AVRIL 1944 :
«…La victoire était proche mais la répression continuait à s’abattre sur la Résistance. Dans leur grande majorité, ils avaient été arrêtés par la police française aux ordres du gouvernement collaborateur de Vichy. Certains avaient été jugés par des tribunaux allemands et ce sont des soldats de l’armée d’occupation qui les fusillaient (…).
« Ces combattants de l’ombre ne se contentaient pas de la lutte, ils avaient une conscience aigüe des réalités et de la nécessité de construire une perspective. Sous l’égide de Jean Moulin, représentant du général de Gaulle en territoire occupé, ils avaient su s’entendre au sein du Conseil National de la Résistance qui réunissait tous les partis politiques qui résistaient, les syndicats et les mouvements de résistance. Ils ont uni leurs efforts pour construire la France de demain. Cet organisme, malgré les difficultés de la clandestinité, adopta un programme révolutionnaire pour l’époque, qui fut mis en œuvre par le gouvernement dirigé par le Général de Gaulle à la Libération. Communistes, socialistes et démocrates chrétiens ont commencé à bâtir ensemble ce qui est encore le fondement de la société dans laquelle nous vivons. N’oublions pas que la sécurité sociale, la retraite par répartition, la liberté de la Presse, le vote des femmes ont été mis en place par ce gouvernement d’union.

« Dans cette clairière, je repense à l’ultime message de mon père. Dans sa dernière lettre, écrite trois heures avant de mourir, il me disait : «…Je tomberai courageusement mon petit Microbe chéri, pour ton bonheur, le bonheur de tous les enfants et de toutes les mamans ». Et il ajoutait encore, en ultime message dans la marge : « Vive la liberté, vive la France ».

« Ces simples paroles résument bien le sens de leur combat à tous.
« Ils ont donné leur vie pour que nous vivions dans un pays libre et démocratique. Il est de notre devoir de continuer leur combat parce que les valeurs qu’ils défendaient sont toujours des valeurs actuelles.
« Face à ceux qui veulent récrire l’histoire, nous affirmons que seules ces idées nous permettront de continuer à vivre dans un pays ou règne la liberté, l’égalité et la fraternité. »